Le Groupe ACP entend devenir un « acteur mondial efficace »
Parallèlement aux préparatifs en vue des négociations sur ses futures relations avec l'Union européenne (UE) après l’expiration de l’Accord de Cotonou en février 2020, le Groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) déploie des efforts concertés pour se transformer en un « acteur mondial efficace » jouant un rôle de catalyseur pour la défense, la protection et la promotion du multilatéralisme dans le cadre global du Programme des Nations Unies pour le développement durable à l’horizon 2030 et ses 17 objectifs de développement durable (ODD).
Comme l’a déclaré le Secrétaire général ACP, Dr Patrick I. Gomes, à InDepthNews UN Insider, l’une des étapes importantes pour atteindre cet objectif est la révision de l’Accord de Georgetown, du nom de la capitale de Guyana où l’accord a été signé en 1975, qui permettra au Groupe ACP de consolider et d’élargir davantage ses fondements.
C’est dans ce contexte que des diplomates venant des 79 États membres du Groupe se sont réunis le 5 avril à Bruxelles pour une session extraordinaire du Comité des ambassadeurs ACP, deuxième organe de décision du Groupe agissant pour le compte du Conseil des ministres entre deux sessions ministérielles. Le Conseil est le principal organe décisionnel ACP chargé, entre autres, de la mise en œuvre des orientations fixées par le Sommet des Chefs d’État et de gouvernement.
L’Accord de Georgetown instituant le Groupe ACP (46 États membres à l’origine) a été signé le 7 juin 1975, tandis que la première Convention de Lomé a été conclue la même année. Cet Accord avait pour objectif de dynamiser la coopération régionale et interrégionale entre les États ACP et entre les pays en développement en général, consolider les liens entre les différentes organisations régionales auxquelles ils appartiennent, et favoriser l’instauration d’un « nouvel ordre économique mondial ».
Le partenaire de coopération du Groupe ACP, à savoir la Communauté économique européenne (CEE), comptait à l’époque neuf États membres. Les autres pays qui ont adhéré par la suite au Groupe ACP étaient encore en voie de décolonisation.
Le Groupe des États ACP, qui est le plus grand groupement de pays en développement du monde, est lié par des obligations conventionnelles. Il dispose d’un secrétariat permanent et bénéficie du statut d’observateur à l’ONU.
Le Groupe s’emploie activement à mettre en œuvre des résolutions et des programmes des Nations Unies, en collaboration avec l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la Convention-cadre des Nations Unies sur le changement climatique (CCNUCC), la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), ONU FEMMES, et le Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud (UNOSSC).
La révision de l'Accord de Georgetown , qui fera suite à celle intervenue en 2003, comprendra notamment un réexamen de certaines dispositions, dont le préambule, les critères d’adhésion et les catégories de membres, une attention particulière étant accordée à la nécessité de laisser une place prépondérante aux contacts et aux relations avec d’autres États et groupes d’États, comme préconisé par les Chefs d’État et de gouvernement ACP lors de leur septième Sommet tenu en 2012.
Lors de la révision, il sera tenu compte du fait que, même si l’Accord repose sur des bases solides et s’est révélé profondément ancré, dynamique et ouvert aux changements novateurs pendant ces 43 années d’existence du Groupe, « nous devons faire preuve de créativité et nous focaliser en priorité sur les enjeux d’un XXIe siècle caractérisé par des évolutions géopolitiques nouvelles et très tumultueuses aux plans national, régional et continental », a déclaré Dr Gomes.
Certains de ces bouleversements comme en Syrie et au Moyen-Orient, la volonté de créer en Afrique une zone de libre-échange continentale (ZLEC), la dérive droitière à travers l'Amérique latine et la menace imminente d'une guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine ont des conséquences sur le développement durable et la transformation structurelle des économies ACP, et donc un impact sur l’objectif « d’élimination de la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde » (ODD 1), qui est essentiel pour l’Organisation .
C’est également pour cette raison que la vision du Groupe ACP a été réaffirmée par les Chefs d’État et de gouvernement lors de leur 8e Sommet tenu en 2016 à Port Moresby (Papouasie-Nouvelle-Guinée), comme suit :
« Nous nous engageons à renforcer la coordination et la concertation entre nos États dans toutes les enceintes internationales, en mettant à profit notre nombre pour obtenir que l’architecture multilatérale soit réformée dans le sens de nos intérêts et de manière à renforcer le rôle de notre Groupe dans tous les domaines de la gouvernance mondiale, afin de contribuer au développement de nos États et à la satisfaction des attentes de nos populations. »
Au moment où le Groupe ACP cherche à se repositionner en tant qu’acteur mondial clé pour faire face à l’émergence de nouveaux défis, problématiques et priorités à l’échelle mondiale, une révision de l'Accord de Georgetown est plus que jamais nécessaire.
La réunion extraordinaire susmentionnée a permis au Comité des ambassadeurs et au Secrétariat ACP « d’engager un débat et un échange de vues approfondis » sur les différentes propositions de modifications et d’ajouts à l’Accord de Georgetown – qui compte plus de 30 articles – soumises par les six régions ACP, à savoir l’Afrique centrale, l’Afrique de l'Est, l’Afrique australe, l’Afrique de l’Ouest, les Caraïbes et le Pacifique.
L’une de ces propositions vise à changer la dénomination de l’organisation (Article 1er Le Groupe ACP) en « Organisation des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (OEACP) ».
Ces suggestions et bien d’autres émanant des régions rendent le processus de révision à la fois pertinent et passionnant, dans la mesure où il vise à renforcer le fondement du Groupe ACP pour lui permettre de s’acquitter de sa responsabilité historique », a déclaré le Secrétaire général Patrick I. Gomes à IDN UN Insider.
« Nous nous appuierons sur une évaluation critique de l’expérience acquise par le Groupe ACP et de son partenariat institutionnel avec l’Europe et nous établirons de nouveaux partenariats, conformément à la vision de nos pères fondateurs. »
Les débats sur cette question se poursuivront pendant les prochaines semaines et, selon des sources ACP, un projet d’accord révisé et consolidé devrait faire l’objet d’un examen juridique avant d’être soumis pour débat d’ici la 107e session du Conseil des ministres prévue à Lomé (Togo) les 28 et 29 mai 2018.
Il est à espérer que le mandat donné au Comité des ambassadeurs lors de la 104e session du Conseil des ministres ACP en novembre 2016, consistant à réviser l’Accord de Georgetown afin de le moderniser, d’y intégrer une nouvelle vision et de l’adapter aux réalités du moment, aura été ainsi exécuté.
Service de presse ACP et InDepthNews